À chaque début d’été, les habitants du Québec, en quête de chaleur, s’installent dans les parcs, remplissent les terrasses et aspirent à la joie des plages et des rives de lac. Pour beaucoup, chaque rayon de soleil, malgré les risques pour la peau, est perçu comme une bénédiction. Cette recherche de lumière pourrait même renforcer notre bien-être, rapporte TopTribune.
Pendant des millénaires, les êtres humains ont évolué en plein air, sous le soleil. Cependant, au cours des deux derniers siècles, de plus en plus de personnes ont été poussées à l’intérieur. Cette transformation sociale a été accompagnée, plus récemment, de nombreuses recommandations sur la protection solaire, visant à prévenir les cancers cutanés.
Néanmoins, une absence de soleil peut également présenter des dangers pour la santé. Des recherches récentes tendent à soutenir cette idée.
Des études montrent que ceux qui s’exposent davantage au soleil ont tendance à vivre plus longtemps. L’obstétricien suédois Pelle Lindqvist s’est initialement penché sur l’impact du soleil sur la prévention des thromboses chez les femmes enceintes, suivant un échantillon de 30 000 femmes depuis les années 1990.
Sa recherche, publiée en 2016 dans le Journal of Internal Medicine, a révélé une surprise : même avec la hausse des cancers de la peau, les plus grands amateurs de soleil avaient une longévité accrue, prenant en compte divers facteurs tels que l’âge, le niveau d’activité physique et le statut socio-économique.
Le manque de soleil représente un risque de mortalité analogue à celui du tabagisme.
Pelle Lindqvist, obstétricien
Une étude similaire, menée depuis 2010 au Royaume-Uni sur une cohorte de 500 000 individus, a confirmé que les personnes exposées au soleil avaient un taux de mortalité plus bas, qu’il s’agisse de maladies cardiaques ou de cancers, selon le dermatologue Richard Weller, qui a publié ses résultats en 2024 dans Health and Place. Il conclut que les avantages d’une exposition aux rayons UV pourraient surpasser les risques dans les régions pauvres en soleil.
Les avancées scientifiques
À l’heure actuelle, les études établissent seulement un lien entre l’exposition au soleil et la prévention de certaines maladies sans prouver de lien causal, comme l’indique le Dr Lindqvist. « Mais les investigations chez les animaux montrent une tendance similaire, souligne-t-il. Nous sommes proches de démontrer un lien entre les doses d’exposition au soleil et une diminution de l’incidence du diabète de type 2. »
Les recherches des deux scientifiques se concentrent sur le nord de l’Europe, où l’insuffisance d’ensoleillement est plus marquée qu’au Québec. En effet, rappelle le Dr Weller, Montréal est située à la même latitude que le sud de la France, ce qui complique la transposition directe de ces découvertes.
Il est essentiel de noter que la surexposition est toujours risquée, mettent en garde les chercheurs. Cela ne veut pas dire qu’il faille se permettre des brûlures solaires!
Les deux chercheurs se joignent à un nombre croissant de scientifiques qui réclament une réévaluation des recommandations officielles concernant l’exposition au soleil. Ils affirment même que le manque de lumière naturelle pourrait constituer un problème de santé publique.
Mais qu’est-ce qui, dans la lumière du jour, contribue tant à notre bien-être?
Plus qu’une simple question de vitamine D
Il est reconnu que l’exposition au soleil favorise la production de vitamine D. Cette hormone, liée à la santé osseuse, influence également plusieurs pathologies, y compris certains cancers, les maladies cardiaques, l’obésité, le diabète, la maladie d’Alzheimer, l’autisme et la sclérose en plaques.
Cependant, des méta-analyses ont montré que l’apport massif en suppléments de vitamine D ne suffit pas à prévenir ces maladies au sein de la population. « Cela m’a intrigué », confie le journaliste scientifique américain Rowan Jacobsen, en pleine rédaction d’un ouvrage sur les effets du soleil sur la santé.
Cela signifie que, chez ces individus en bonne santé, qui disposent de toute cette vitamine D, un autre élément, lié à la lumière solaire, serait responsable de leur excellente condition physique.
Rowan Jacobsen, journaliste scientifique
Ce phénomène commence à être documenté dans la littérature scientifique. « De nouvelles études indiquent que la lumière solaire pourrait exercer un effet systémique beaucoup plus large, en diminuant le risque de certains cancers, en régulant les hormones (comme la mélatonine et la sérotonine), en prévenant la myopie infantile… et en allégeant certains troubles métaboliques », suggère une recherche de l’agence de santé publique britannique publiée en 2023 dans Scientific Report.
Un effet apaisant puissant
Quels mécanismes permettent au soleil d’influer sur notre organisme? Diverses pistes sont explorées. Par exemple, la douceur des rayons sur la peau activerait l’oxyde nitrique, une molécule reconnue pour abaisser la pression artérielle.
Cette découverte pourrait avoir des implications majeures pour la santé publique, étant donné que les maladies cardiovasculaires demeurent la première cause de mortalité dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la santé.
Des chercheurs de l’agence de santé publique britannique ont récemment exposé des cellules cutanées in vitro à la lumière du soleil, durant les journées ensoleillées de mai à août 2021. Cette exposition a non seulement activé l’oxyde nitrique, mais aussi sans causer de dommages cellulaires. « Cela signifie que de courtes périodes d’exposition à la lumière naturelle du soleil pourraient être bénéfiques pour notre santé sans les risques liés à la surexposition », précise avec enthousiasme Paul O’Mahoney, responsable du groupe de recherche sur les effets des rayonnements à l’UK Health Security Agency.
Au-delà des maladies cardiaques, la lumière solaire pourrait également modérer les réponses immunitaires, un effet favorable en cas de maladies auto-immunes comme la sclérose en plaques, souligne Rowan Jacobsen, qui a récemment publié un article sur ce sujet pour Scientific American. Sans oublier l’effet du soleil sur l’humeur, grâce à la libération d’endorphines, et sur la régulation des rythmes circadiens, permettant un sommeil réparateur la nuit et une vigilance durant la journée.
« Sortons, résume Rowan Jacobsen. Prenons soin de nous, utilisons de la crème solaire si nécessaire, mais n’oublions pas d’aller dehors! »